On a profité du trajet retour de la cérémonie Michelin 2022 pour s’isoler côté wagon-bar avec le chef Matthias Marc, un coca-cola et un paquet de mini saucissons posés sur la table rétractable, dans l’idée de mieux connaître le profil de touriste gastronomique de l’ancien candidat de Top Chef tout juste auréolé d’une étoile.

Qu’est-ce que la gastronomie française a de plus que les autres selon vous ?

Matthias Marc : « C’est un vivier. La gastronomie est historique chez nous, il suffit de voir qu’il y a aujourd’hui 31 trois étoiles, 72 deux étoiles et 522 une étoile. Derrière ces chefs, on compte des sous-chefs, des chefs de partie, des commis… À la fin, tout le monde ne sera pas étoilé, mais ils auront tous appris à travailler dans de très belles maisons. On a des cuisiniers formés dans des deux étoiles qui ouvrent des pizzerias, reprennent des cafés ou des auberges. Ça ne veut pas dire que c’est obligatoire. Il y a des restaurants non étoilés incroyables. Et, inversement, des gradés chez qui tu seras peut-être déçu par l’expérience. Être étoilé, c’est, forcément, porter une distinction, ça souligne une qualité certaine, mais ne pas l’être ne fait pas de toi un mauvais cuisinier.

On a aussi la chance d’avoir des produits complètement fous, ce qu’aucun autre pays, je pense, ne peut se targuer d’avoir. C’est à l’image de nos territoires, divers et variés. On a accès aux produits de montagne, de l’océan, de la mer… Il y a un potentiel extraordinaire. En France, on mange très, très bien, et notamment à Paris. C’est pour ça pour moi que c’est la scène gastronomique la plus explosive au niveau international. Je pourrais quitter la ville pour m’installer dans le Jura, parce que parfois j’ai l’impression de ne pas aller au bout de mes convictions sur l’utilisation des produits de chez moi, mais je pense que la capitale me manquerait, surtout d’un point de vue personnel. C’est un confort de vie que je suis allé chercher. Peut-être à la fin de ma carrière. »

Votre destination culinaire préférée dans le monde ?

M.M. : « Copenhague ! C’est vraiment un des endroits où les restaurants trois étoiles et les grands gastronomiques sont les plus novateurs au monde et où l’expérience client est la plus exacerbée et au centre des projets. Va chez Alchemist [Rasmus Munk, deux étoiles, ndlr], Noma [René Redzepi, trois étoiles], Geranium [Rasmus Kofoed, trois étoiles] ou encore Kadeau [Nicolai Nørregaard, deux étoiles], tu te prendras déjà quelques belles claques. Ça c’est vraiment pour le côté gastronomique, je dirais sûrement Bangkok pour l’endroit où on mange le mieux dans le monde. »

Justement, quelle est la cuisine étrangère qui vous inspire le plus ?

M.M. : « Un mélange entre cuisine nordique et sud-américaine, tout ce qui est utilisation de bois, de braise, m’inspire énormément. Et puis, pour la fraîcheur végétale, ou du moins herbacée, je pencherais pour la cuisine israélienne. C’est difficile de choisir, en réalité, il y a des aspects que j’aime dans chaque cuisine du monde. Dans la mienne, j’essaye d’être funambule sur les équilibres, ça passe par un peu d’épices, un peu d’acidité, il faut être juste et stable pour créer de l’émotion. »

En parlant d’émotion, racontez-nous votre plus bel émoi gustatif loin de chez vous…

M.M. : « C’était à Tel Aviv, en Israël, un endroit qui s’appelle Burek Restaurant. Plusieurs raisons à cela. D’abord, l’énergie que dégage cette ville de manière générale, et puis, ensuite, la cuisine israélienne que j’affectionne particulièrement. Ensuite, des plats que j’ai trouvés extraordinaires… L’ensemble m’a procuré beaucoup d’émotions. C’est là que ça devient intéressant : je pense qu’une recette ne suffit pas à procurer des sensations. Il faut les bonnes personnes, au bon endroit. C’est une histoire de souvenirs. La cuisine est quelque chose de très technique, si tu la transposes ailleurs, l’émotion sera différente. Tu pourras dire que c’est très bien fait, excellent même, mais pour ressentir quelque chose il faut un tout. »

Un produit que vous avez découvert et qui vous a surpris lors d’un voyage à l’étranger, que vous l’ayez aimé ou pas ?

M.M. : « Il y a un truc assez fou, le nuoc-mâm, qu’on trouve en Thaïlande. C’est du poisson fermenté, tu ne boirais pas le liquide à la cuillère, ça sent mauvais, ce n’est pas bon, mais quand on le travaille, qu’on le cuisine, le produit devient incroyable. »

Le restaurant où vous rêvez d’aller dîner à l’étranger ?

M.M. : « J’adorerais aller manger chez Francis Mallmann, en Patagonie, ça me ferait vraiment plaisir. Il faut voyager un peu mais à mon avis ça vaut le détour… »

Et en France ?

M.M. : « Ici ? J’ai tout fait ou, en tout cas, je suis allé dans tous les endroits où je rêvais de me rendre. »

Pour qui ou quoi vous traverseriez le pays ?

M.M. : « Je traverserais la France pour manger chez Glenn Viel, à l’Oustau de Baumanière, aux Baux-de-Provence [trois étoiles au Guide Michelin]. Pour le lieu, pour l’homme, sa vision, sa cuisine, ce qu’il dégage. Pour tout. Un des plus beaux moments que j’ai passé à table, c’est dingue, et ça le sera encore plus l’été prochain je pense. »

Votre snack de voyage préféré ?

M.M. : « Les bonbons qui piquent ! »

Pour les vacances, appart avec gazinière ou hôtel all inclusive ?

M.M. : « Ni l’un, ni l’autre : je ne vais sûrement pas me faire à manger quand je suis en vacances et quand je suis à l’hôtel, je mange dehors, je ne reste pas à l’intérieur. Je ne cuisine jamais chez moi au quotidien, je n’éprouve aucun plaisir à cuisiner uniquement pour moi ou même pour une seule autre personne. Disons qu’il faut qu’il y ait au moins quatre personnes à table. En réalité, la semaine je suis tout le temps au travail, 100 % de mes repas se font là-bas. Il reste le week-end, je vais au restaurant, dans des quartiers que j’adore, à Trois fois plus de piment, à Paris, par exemple. Le dimanche soir, si je ne croise pas les personnes qui vont me faire sortir, ça finit en sushis devant Netflix. »

Le plat qui vous manque le plus quand vous êtes loin de chez vous ?

M.M. : « Un plat tout bête : pommes de terre arrosées de cancoillotte et saucisse de Morteau, salade bien vinaigrée. C’est la base de mon alimentation, mon plat préféré, celui que j’ai mangé toute mon enfance. Dans ma famille, quand on recevait du monde, même quand le frigo était vide, on trouvait toujours des pommes de terre, une salade et des saucisses de Morteau quelque part pour rassasier tout le monde. »

Top 16 quelle est la salade la plus explosive synthétisé par Phuoc Kieng